Managers et people pleasing : vouloir plaire à tout le monde ça épuise…
« Un manager qui dit toujours oui finit souvent par se dire non à lui ou elle-même. »
Dans un monde professionnel où la performance, la réactivité et la collaboration sont constamment valorisées, beaucoup de managers tombent dans le piège du people pleasing : cette tendance à vouloir plaire de façon excessive, à dire « oui » à toutes les demandes et à éviter le conflit coûte que coûte.
Si cette attitude peut, à première vue, sembler positive — montrer de l’empathie, être disponible, chercher à satisfaire ses collaborateurs — elle cache souvent une réalité bien plus complexe : perte de repères, surcharge émotionnelle, difficultés à prendre des décisions claires et risque d’épuisement professionnel.
J’ai eu l’occasion d’explorer ce sujet en profondeur dans un article publié par Courrier Cadres (lien), et il me semblait essentiel d’aller encore plus loin ici. Car le people pleasing n’est pas seulement une habitude personnelle : c’est un enjeu managérial majeur, qui impacte la qualité du leadership et le bien-être des équipes.
Dans cet article, nous allons comprendre les racines du people pleasing, analyser ses conséquences pour les managers et découvrir des pistes concrètes pour en sortir — notamment grâce à l’accompagnement et au coaching.
Qu’est-ce que le people pleasing?
Le people pleasing peut se traduire par « besoin compulsif de plaire ». C’est cette tendance à dire «oui» même quand on pense « non », à se conformer aux attentes des autres, et à faire passer les besoins d’autrui avant les siens, au risque de s’oublier.
Chez les managers, ce comportement prend une dimension particulière : toujours disponible, toujours conciliant, toujours à l’écoute… quitte à s’épuiser ou à manquer de clarté dans leurs décisions. Derrière cette attitude, il ne s’agit pas d’un simple excès de gentillesse, mais souvent d’un mécanisme psychologique profondément ancré.
Les origines du people pleasing sont multiples :
L’éducation : on apprend très tôt que « faire plaisir » est valorisé, voire récompensé.
Les croyances : « si je dis non, je décevrai », « un bon manager doit être aimé ».
La peur du conflit : éviter la confrontation, même au détriment de ses propres limites.
La culture d’entreprise : certaines organisations valorisent la disponibilité totale, la réactivité immédiate et la loyauté sans faille.
Il est important de distinguer le people pleasing de l’empathie authentique. Être attentif aux besoins de ses collaborateurs est une qualité managériale précieuse. Mais lorsque cette attention se transforme en incapacité à poser des limites, elle devient un piège. Le manager risque alors de multiplier les compromis, de s’éparpiller et de perdre en crédibilité.
En résumé, le people pleasing n’est pas seulement un comportement relationnel. C’est un schéma de fonctionnement qui, s’il n’est pas conscientisé, peut fragiliser à la fois le manager et son équipe.
Impact du people pleasing
Les conséquences de cette posture ne sont pas anodines. Elles se manifestent à trois niveaux : individuel, relationnel et organisationnel.
Impact individuel
Un manager qui dit toujours oui finit par s’exposer à une surcharge mentale et émotionnelle. Il accepte trop de tâches, ne prend pas le temps de se ressourcer et peut rapidement glisser vers le surmenage.
À force de répondre aux attentes des autres, il perd le contact avec ses propres besoins et ses priorités. Cela conduit souvent à un sentiment de frustration, voire d’injustice (« je donne tout, mais on n’en fait jamais assez »). Sur le long terme, ce terrain favorise l’épuisement professionnel.
Impact relationnel
Un manager qui veut plaire à tout prix peut paradoxalement affaiblir la relation avec son équipe. Pourquoi ? Parce qu’un « oui » qui ne reflète pas une conviction sincère manque de solidité. Les collaborateurs finissent par sentir que les décisions sont dictées par la peur de décevoir, et non par une vision claire. Cela génère de l’ambiguïté et un manque de confiance.
Impact organisationnel
Au niveau collectif, le people pleasing entraîne des décisions floues, des priorités mal définies et des projets mal cadrés. Dire oui à tout, c’est multiplier les compromis et diluer les objectifs. L’organisation devient moins efficace, les équipes se dispersent et le manager lui-même finit par perdre sa crédibilité auprès de sa hiérarchie.
En résumé, vouloir plaire à tout le monde peut sembler bienveillant, mais c’est en réalité un frein à l’efficacité, à la confiance et au leadership authentique.
Pourquoi est-ce si difficile de dire non ?
Savoir dire non paraît simple… en théorie. Pourtant, de nombreux managers éprouvent une réelle difficulté à poser des limites.
Les « drivers » inconscients
En psychologie, on parle de drivers : ces injonctions intériorisées pendant l’enfance, comme « Sois fort », « Dépêche-toi »… ou « Fais plaisir ». Ces messages deviennent des réflexes automatiques à l’âge adulte et influencent notre manière de travailler.
Les croyances limitantes
Beaucoup de managers associent le non à une forme de rejet ou de faiblesse. Ils se disent :
« Si je dis non, on m’aimera moins. »
« Si je refuse, je ne serai pas un bon manager. »
« Dire non, c’est décevoir. »
La peur du conflit
Dire non, c’est parfois prendre le risque de créer de la tension. Or, pour beaucoup de managers, maintenir la paix dans l’équipe est une priorité absolue. Ils préfèrent donc se taire ou céder, même si cela les met en difficulté.
Cette difficulté à dire non n’est donc pas un manque de compétence, mais bien le résultat de mécanismes psychologiques profonds, souvent invisibles pour ceux qui les subissent.
Dire non comme acte de leadership
Et si le non n’était pas un refus, mais une affirmation de soi ?
Un « non » posé avec clarté et bienveillance n’est pas une rupture de relation, mais au contraire un acte de respect : respect de soi-même, de son temps, et respect de l’autre en lui donnant une réponse honnête.
Le non construit la confiance
Lorsqu’un manager dit non, il envoie le message suivant : « Je connais mes limites et je respecte nos priorités. » Cela crée un cadre rassurant pour l’équipe, qui sait à quoi s’en tenir.
Le non clarifie les décisions
Un non ferme mais bienveillant évite les ambiguïtés. Il donne de la clarté, ce dont les collaborateurs ont profondément besoin pour avancer.
Le non préserve l’énergie
Un manager qui sait dire non garde son énergie pour ce qui compte vraiment. Il incarne un leadership aligné, fondé sur la cohérence et l’authenticité.
En somme, dire non est une compétence managériale clé. Ce n’est pas une barrière, mais un outil de leadership au service de l’efficacité et de la qualité des relations.
Comment sortir du people pleasing ?
Passer du « oui automatique » à un « non aligné » demande un travail en profondeur. Voici quelques pistes.
1. Prendre conscience
La première étape est l’auto-diagnostic. Observer dans quelles situations on a tendance à dire oui contre son gré. Quels sont les déclencheurs ? Avec qui cela se produit le plus ?
2. Reprogrammer ses croyances
Il s’agit ensuite de déconstruire les croyances limitantes :
Dire non ne fait pas de moi une mauvaise personne.
Refuser, c’est aussi protéger mes priorités.
Être un bon manager, ce n’est pas plaire à tout le monde, mais agir avec justesse.
3. S’exercer
Commencer petit : dire non dans des situations à faible enjeu. Formuler un refus clair mais respectueux. Exemple : « Merci pour ta proposition, mais je ne peux pas la prendre en charge cette semaine. »
4. Utiliser des techniques d’assertivité
La communication non violente (CNV) est un outil puissant : exprimer son ressenti, dire ses besoins, poser ses limites et proposer des alternatives. Cela permet d’éviter la culpabilité et la confrontation inutile.
5. Se faire accompagner
Sortir du people pleasing seul est difficile, car ce schéma est souvent profondément enraciné. Le coaching offre un espace sécurisé pour identifier ces mécanismes, expérimenter de nouveaux comportements et développer une posture de leader aligné.
Le coaching est un accélérateur de prise de conscience et de transformation.
Identifier les mécanismes invisibles : Le coach aide le manager à comprendre d’où vient son besoin de plaire et comment il se manifeste au quotidien.
Travailler sur les croyances : Grâce à des outils spécifiques, le coaching permet de remplacer les croyances limitantes par des pensées plus aidantes.
Expérimenter en sécurité : Le coaching offre un espace d’essai, où le manager peut tester de nouvelles façons de communiquer et recevoir un feedback bienveillant.
Développer une posture de leader authentique : En apprenant à dire non avec confiance, le manager renforce sa crédibilité et son équilibre.
De nombreux managers témoignent d’un avant/après coaching : moins de culpabilité, plus de clarté dans leurs décisions, et une meilleure qualité de relation avec leurs équipes.
En conclusion, le people pleasing n’est pas une fatalité. Vouloir plaire à tout le monde peut sembler rassurant, mais c’est en réalité un piège qui fragilise à la fois le manager et ses équipes.
Dire non n’est pas un acte de rejet : c’est un acte de leadership, un choix de clarté, d’authenticité et de respect.
Le coaching offre un accompagnement précieux pour sortir de ces schémas, retrouver un équilibre et incarner un management plus aligné et plus puissant.